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Réinventer nos milieux de vie en s’inspirant de l’Italie

Voici un texte de Catherine Chouinard et Jean-Pierre Girard publié dans Le Devoir du 12 juin, en lien avec la conférence de la professeure Ciaffi.

Les données sont percutantes : en 2023, plus de 280 municipalités italiennes ont adopté le Règlement pour l’administration partagée des biens communs. En terme pratique, cela revient à dire que ces municipalités sont engagées dans une démarche de partage de gestion de projets avec des habitants, des groupes informels, des collectifs citoyens et des entreprises d’économie sociale, que ce soit pour une usine désaffectée qui devient un espace communautaire, un projet de recherche intégrée sur la décontamination des sols, d’autres projets interpellant des espaces verts, des écoles, le secteur de la santé et des services sociaux.

Et cela n’est que la pointe de l’iceberg. Dans le pays de Dante, on relève que près de 7000 pactes de coopération sont en cours. C’est par ces pactes que s’actualisent les ententes entre les administrations municipales et les citoyens, des pactes portés par les notions de bien commun, d’intérêt général.

Au coeur de cette façon de faire, aux antipodes du modèle dominant de gestion de type top down où le central sait et impose tout, prévaut le principe de subsidiarité horizontale. En quelques mots, il s’agit d’une règle qui revient à dire que la responsabilité d’une action publique, lorsqu’elle est nécessaire, est dévolue à l’entité compétente la plus proche de celles et ceux que cette action concerne.

Dans un contexte où les municipalités ont de plus en plus de responsabilités quant au développement social et où la transition écologique est un passage obligé pour un avenir un tant soit peu moins sinistre que celui promis par les changements climatiques dans un mode passif, le Québec ne peut faire l’économie de ce savoir, de cette façon de faire, qui redonne un pouvoir d’agir aux citoyennes et citoyens, et plus largement alimente l’espoir d’une société civile engagé activement dans la transition. 

Il s’agit ni plus ni moins d’un changement radical de nos façons de faire qui interpelle également le modus operandi du gouvernement du Québec. Un exemple parmi de nombreux autres : la coopérative de solidarité Sabsa de Québec fait la démonstration depuis 2011 de la capacité d’infirmières praticiennes de prendre en charge des cas de patients avec des défis majeurs de santé : hépatite C, VIH-SIDA. Près de 90 % des cas traités par cette clinique ne nécessitent pas de référencement à d’autres professionnels de santé, une révolution dans notre façon de concevoir la santé ! Tout n’est plus sous hégémonie médicale ! Cette coopérative est sous la gouvernance d’employés de l’organisation et de citoyens des quartiers Saint-Roch et Saint-Sauveur de la Vieille Capitale.

Devant les résultats incontestables dégagés par la coopérative, le ministère de la Santé a fini par reconnaître la contribution du rôle des infirmières praticiennes et a décidé de le répliquer, mais avec cet immense travers propre à l’État québécois, CONTRÔLER ! En effet, à l’exemple de cette règle de subsidiarité, au lieu de faire confiance à la capacité d’organisations de la société civile à prendre en charge l’activité locale, comme la coopérative Sabsa, deux cliniques d’infirmières praticiennes sont créées à Montréal par le ministère, MAIS au sein de structures publiques, les mégas CIUSSS  À l’évidence, l’État québécois a encore à apprendre sur ces façons de faire pour et avec la société civile.

Ainsi, l’exemple italien des pactes de coopération trace la voie d’une façon de faire porteuse d’espoir.

À noter que le lundi 12 juin, de 14 h à 16 h, Daniela Ciaffi, professeure de sociologie urbaine à l’Université Polytechnique de Turin (Italie) et vice-présidente du Laboratoire pour la subsidiarité, prononcera une conférence publique (hybride) à HEC Montréal portant sur l’exemple italien des pactes de coopération. La conférence sera accessible en visionnement par la suite.


Catherine Chouinard et Jean-Pierre Girard

La première est directrice générale de Communagir ; le second est chargé de cours à HEC Montréal (ESG/UQAM).

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